Voila mon problème : Il y a deux représentations du monde : le monde que je perçois et le monde de l'infiniment petit. Dans le monde que je perçois la matière semble cohérente (1) et les mathématiques purement imaginaires (2). Dans le monde de l'infiniment petit, ce sont les mathématiques qui semblent cohérentes (3) et la matière paradoxale (4). Voilà ma question : La matière étant continue de l'infiniment grand à l'infiniment petit. Alors, pourquoi la frontière entre ces deux mondes si différents est-elle précisément située à l'échelle du champ visuel de l'homme ? Y a-t-il une erreur quelque part ou l'homme est-il devenu étalon de l'univers ? (1) Par exemple une étoile ou un grain de sable ne passera au même moment que par une et une seule des deux fenêtres d'un obstacle. (2) Par exemple, deux demi-cochons n'ont jamais fait un cochon. Je veux bien vous couper en deux et demander à vos deux moitiés de me prouver le contraire. (3) Par exemple les quantas, Planck, … (4) Par exemple dualité onde-corpuscule, effet tunnel, intrication |
![]() Remerciement à Monsieur Roger Balian pour sa réponse. Un des fondateurs du Service de Physique Théorique de Saclay au début des années 60, Roger Balian en est toujours un des membres les plus éminents. Il l'a dirigé de 1979 à 1987. Membre entre autre de l'Académie des Sciences, ancien élève et ancien Professeur à l'Ecole Polytechnique, ancien directeur de l'Ecole de Physique des Houches, auteur d'ouvrages d'enseignement réputés |
Cette excellente question, que tout physicien s'est posée au moins une fois, est apparentée au problème épistémologique de "la dérisonnable efficacité des mathématiques" (Wigner). Mon point de vue (matérialiste) est le suivant. Le mathématiques sont un langage élaboré dans nos cerveaux, en symbiose avec la physique, à partir de l'observation de la nature. Elles permettent de s'en faire une image mentale et d'agir sur elle, de même que le langage ordinaire mais plus efficacement. A notre échelle, nous percevons de façon assez réaliste les objets, avec nos sens et avec nos instruments, suffisamment pour décrire intuitivement des objets individuels (ce que vous appelez "cohérente"). Mais les maths n'ont rien d'"imaginaire" : elle nous fournissent une image précise (loi de Newton, eq de Maxwell, etc) Les choses commencent à changer un peu lorsqu'on traite d'objets complexes, comme en mécanique statistique classique, où nous sommes incapables de décrire le détail des objets. Là, une branche particulière des mathématiques, les probabilités, nous aident à faire de prévisions rationnelles, non pas sur des objets individuels mais génériquement, sur des ensembles statistiques d'objets. Mais ceux-ci continuent à pouvoir être décrits intuitivement. Pour les objets microscopiques quantiques, ce n'est pas seulement une méconnaissance des propriétés des objets qui nous freine pour en avoir une vision "cohérente", mais les concepts même que nous avons élaborés à notre échelle et qui se révèlent inadéquats ici : on ne peut parler à la fois de position et de vitesse pour une particule, sinon de façon floue ; la lumière est à la fois onde et corpuscule, avec un certain flou. Notre description est alors irréductiblement probabiliste : nous ne savons décrire que des ensembles statistiques, pas des objets individuels, mais nous avons réussi à élaborer de mathématiques qui permettent au moins cela avec une remarquable efficacité. Ce qui nous apparaît paradoxal l'est en raison de notre incapacité à créer des concepts adéquats, en raison de la grande différence entre l'échelle d'observation et celle de l'objet. Enfin, la mécanique statistique (quantique) permet de concilier les échelles, en nous montrant que les lois des objets à notre échelle pevent se déduire (en principe) de celles du monde microscopique. Ce n'est pas l'homme qui est un étalon de l'Univers, mais il est normal que le monde nous apparaisse plus intelligible à notre échelle qu'à l'échelle microscopique, puisque notre cerveau où se forment les images scientifiques des objets est lui-même un objet macroscopique... |
l'ordinateur n'agit-il pas comme un miroir déformant sur la recherche fondamentale ? Les jeux vidéo symbolisent bien la réalité faussée : L'ordinateur miroir aux alouettes. Un ordinateur est un "automate fini", les pièces de son puzzle sont les entiers et les flottants. Cela représente fort mal le discret et le continu de l'image statistique de notre réalité. Discret et continu sont étroitement imbriqué dans le réel par exemple dans le principe d'émergence : - d'une soupe de particules naissent des systèmes solaires, - d'une soupe de cellules naissent des organes, - etcétéra... Entier et flottant sont partitionnés dans l'ordinateur, ils ne sont pas imbriqués. L'ordinateur converti entier en flottant et vice versa suivant la bonne volonté du programmeur. La recherche fondamentale produit des modèles de plus en plus quantiques depuis l'utilisation d'un outil lui-même quantique : l'ordinateur. N'est-ce pas une erreur ? |
![]() Remerciement à Monsieur Roger Balian pour sa réponse. Un des fondateurs du Service de Physique Théorique de Saclay au début des années 60, Roger Balian en est toujours un des membres les plus éminents. Il l'a dirigé de 1979 à 1987. Membre entre autre de l'Académie des Sciences, ancien élève et ancien Professeur à l'Ecole Polytechnique, ancien directeur de l'Ecole de Physique des Houches, auteur d'ouvrages d'enseignement réputés |
Bien que je n'aie personnellement guère utilisé l'ordinateur dans mes recherches, je trouve que, à condition de ne le considérer que comme un outil, ce que font tous les chercheurs, ce qu'il apporte est très précieux : gain de temps dans les calculs, simulation, modèles, pilotage d'expériences et dépouillement des résultats ... Son caractère discret n'interfère en rien avec le caractère discret ou continu ds objets réels dans ce genre d'utilisations, et personne ne confond ses résultats avec la réalité. Ce n'est hélas pas vrai pour d'autres utilisateurs. Certains ingénieurs, économistes ou mathématiciens financiers font confiance à des résultats qui n'auraient certes pu être obtenus par des moyens moins élaborés, mais qui sont basés sur des prémisses douteuses... Le problème là n'est pas l'ordinateur mais ce qu'on y met comme ingrédient, exactement comme pour des calculs mathématiques NB : les ordinateurs actuels n'ont rien de "quantique", ils fonctionnent à l'aide de composants discrets mais obéissant à une logique classique |
À ma naissance, comme beaucoup, j'ai eu la chance qu'on m'impose une religion, la religion de mes pères : dans mon cas, le catholicisme. Ensuite j'ai été éduqué, je me suis éduqué, je me suis tu, j'ai écouté, j'ai appris à respecter les autres , tous les autres et des convictions se sont imposés à moi. J'imagine que Dieu rayonne. Ceci n'est qu'une image. Elle est facile. Imaginez avec moi que Dieu soit comme un soleil et qu'il irradie. Imaginons que les hommes, tous les hommes habitent une vaste maison. Une et une seule vaste demeure. Alors, les religions, toutes les religions, sont comme les fenêtres de cette maison. De temps en temps des hommes s'aventurent à l'extérieur de la maison. Car on peut sortir de cette maison. Ils découvrent la lumière crue, le soleil, Dieu et ses bienfaits. Quand ils reviennent dans la maison, ils révèlent ce qu'ils ont vu. Ils deviennent alors des prophètes, des démiurges. Il n'est pas facile d'exprimer une expérience avec des mots. Alors, ceux qui reçoivent les mots de ces révélations avec le temps percent de nouvelles fenêtres et les décorent avec ce qu'ils ont compris des mots de ces révélations. Certaines fenêtres sont décorées d'étoiles et de mur de temple. Certaines fenêtres sont décorées de croissants et de noms de Dieu. Certaines fenêtres sont décorées de croix et d'esprit saint. Certaines fenêtres sont décorées d'éléphants et de singes. Certaines fenêtres sont décorées de robes couleur Safran et de feuilles de lotus. Etcétéra... Depuis que l'homme et homme. Et tant que l'homme vivra. Nous prions le même Dieu au travers de fenêtres décorées différemment. Il y a aussi un groupe très particulier d'individus qui habite la cave de la maison. Ils ont inventé l'électricité. Ils sont persuadés que parce qu'ils s'éclairent à l'électricité ils ont démontré que le Soleil ne brille pas : ce sont les athées. Voilà la meilleure image que je peux faire de ma foi. |
![]() Remerciement au Père Jean-Baptiste Masson pour sa réponse. Ordonné prêtre en 2007, vicaire à Seclin puis administrateur à Houplin, Seclin Noyelles et Attiches. Curé de la paroisse Saint-Benoît des Marais à Lomme. |
Pour réagir à votre message, j'aime beaucoup votre image de la maison avec la lumière qui brille à l'intérieur. Je pense effectivement que la lumière est intérieure. La maison je la verrai comme notre vie intérieure, éclairée par Dieu. On peut faire cette expérience de Dieu dans toutes les religions puisque c'est lié à la nature de l'homme de pouvoir penser à Dieu et le connaitre. Par contre je pense que toutes les religions ne se valent pas, ce qui m'empêche d'adhérer à l'idée des fenêtres qui diffuseraient chacune à leur manière la même lumière divine. Sauf à dire que ces fenêtres ne diffusent pas toutes bien la lumière, qu'elle la déforme, en ajoute ou en retire. Parmi les religions non chrétiennes, celle dont je me sens le plus proche c'est le judaïsme, dont j'aime la culture. Dans l'Islam j'aime le sens de la grandeur de Dieu. Par contre je reproche à l'Islam d'être trop une religion et pas assez une foi, trop un système social, économique et militaire, dans lequel ce qui compte c'est de savoir ce qui est permit ou défendu avant de connaitre Dieu et d'être en communion avec lui. Dans le christianisme il s'agit d'abord d'une foi au Christ, qui mène à une relation vivante à Dieu. La notion de religion est secondaire vis à vis de la foi. Par ailleurs je ne suis pas du tout inspiré par la figure de Mahomet qui est un violent, manipulateur et opportuniste. Il y a de nombreux passages du Coran que je trouve absolument faux et effrayants sur le plan humain. Je vois le Coran comme une tentative manquée de récupérer le judaïsme et le christianisme au profit de la conquête militaire. J'estime les musulmans qui ont la foi, et qui peuvent mener une vie droite et avoir trouvé personnellement un chemin vers Dieu, mais je pense que l'Islam en soi est une catastrophe pour l'humanité. Le Coran comme "tout révélé" qui s'impose d'autorité ne tient pas la route face à la Bible qui est magnifique et qui contient en elle même des principes d'interprétation qui renvoient chacun à sa conscience et sa recherche personnelle de Dieu. Vis à vis des spiritualités ou religions d'Orient, j'aime bien l'aspect iconoclaste du Bouddhisme, même si au bout d'un moment ça ne conduit plus à rien. Le problème du Bouddhisme dans sa version occidentale c'est qu'il centre trop les gens sur eux même, qui finissent par se perdre dans la quête d'eux-même plutôt que d'être en quête de Dieu. Le bouddhisme oriental plus authentique conduit au renoncement à soi pour vivre l'illumination, mais dans une vision que je trouve trop négative de la vie humaine. Dans l'Indouisme j'aime bien le coté vivant et coloré, le sens de la piété populaire, facile d'accès, mais c'est une religion trop entièrement liée à une culture, qui manque de portée universelle. Voilà quelques considérations personnelles qui n'ont pas une grande valeur argumentaire, mais qui expliquent pourquoi je ne crois pas que toutes les religions se valent. Il y a bien sûr un seul Dieu, mais sa lumière ne brille pas de façon identique dans toutes les religions. Personnellement j'ai reconnu dans le Christ cette lumière. C'est vrai aussi que sur un plan personnel je me suis souvent senti plus proche de croyants d'autres religions que de personnes athées, sans doute du fait de ma foi chrétienne. |